Patrick Bower (& The World Without Magic) n'est pas le prochain buzz band. C'est le projet d'un homme qui a de la bouteille, pas moins de dix ans de métier derrière lui, et qui prend son temps. Pas par paresse non, mais par souci du détail. Celui de faire une pop mélancolique qui nous colle à la peau. Rencontre autour d'un café à parler musique, la sienne et celle des autres, et ce à quoi peut aspirer un grand barbus de trente deux ans.
Peux tu présenter ton groupe et ta musique?
Je m'appelle Patrick Bower et mon groupe s'appelle The World Without Magic, on vient de Brooklyn, New-York. On nous décrit souvent comme un groupe qui fait du folk, étant donné que je joue de la guitare acoustique mais je dirai qu'il s'agit de pop psychédélique.
Comment s'est passé ton concert vendredi?
C'était vraiment cool, on a adoré le lieu (la Flèche d'Or, ndlr).
C'était la 1ère fois que tu y jouais?
Oui, la dernière fois on a joué à l'International et au Pop In, donc là c'était une salle beaucoup plus grande, mais les gens ont eu l'air d'aimer. On jouait en premier mais il y avait du monde.
Tu rejoues mardi à l'International, tu as hâte, tu stresses?
Je ne suis pas stressé, non. Enfin si, mais que les jours "off". J'aime avoir un but, avancer. Mais bon ça me donne l'occasion de voir Paris. En plus aujourd'hui c'est la Saint Valentin, donc je vais pouvoir emmener ma copine déjeuner après.
Tu prends ça au sérieux la Saint Valentin?
Non, c'est juste une bonne excuse pour se faire un bon restaurant!
Hier c'était les Grammy's tu as regardé?
Non, mais je sais qu'Arcade Fire a gagné. Ce n'est pas mon truc. J'ai aimé les 2 premiers albums mais ils me rappellent Bono de U2 maintenant! (rires) Je n'arrive pas à me faire à leurs manières. Ils ont de l'ambition et tant mieux pour eux, on a besoin de grand groupe rock'n'roll dans le monde.
Ce qui a surpris tout le monde c'est que ce sont les Black Keys ont gagné l'album de l'année.
Ça c'est cool, je suis heureux pour eux vraiment, ils sont géniaux!
Qui t'inspire dans l'industrie musicale?
Je dirais que les carrières de Scott Walker et Robert Wyatt m'inspirent profondément. Ce sont deux artistes qui ont des visions si particulières, complètement intemporelles et qui, passés 50 ans, arrivent à faire de la très bonne musique. Et dans la pop, Elvis Costello fait de l’excellente musique, il a fait de très bons choix au fil des années. Je me sens proche de quelqu'un comme Bill Callahan. Il a une bonne attitude, très terre à terre, il se considère comme un artiste et pas comme une rock star. Et il en va de même pour moi, je n'ai jamais voulu être une grosse pop star, je veux simplement faire la musique qui m'intéresse.
Quand as-tu décidé de faire de la musique? Il y a eu un événement déclencheur ou tu berces dedans depuis tout petit?
Depuis tout petit. Mon père était chanteur dans un groupe, j’avais 16 ans lors de mon premier concert, je faisais sa 1ère partie. Ensuite persévérer la dedans, c'est autre chose, mais je passe mon temps à écrire et enregistrer et je veux que les gens écoutent ce que je fais, donc je n'ai pas vraiment le choix. Je ne peux vraiment pas me passer d'écrire.
Comment ça se passe justement au niveau de la composition et de l'écriture? Par lequel commences-tu?
J'essaie de tout faire en une fois. J'ai une idée, souvent la musique, ensuite j'ai ce rouleau de papier de 3 m de long et j'ai écrit toutes mes chansons dessus. Je peux écrire que quelques notes sans forcément finir la chanson mais c'est un bon moyen pour moi de garder une trace de ce que je fais.
Et ensuite tu fais comment pour choisir parmi toutes celles que tu as composées?
Ça c'est la partie la plus difficile! Déjà il y a notre label, notre manager qui nous demande certains trucs ce qui me pousse à terminer et avoir une date butoir aide quelque part.
Où rêverais-tu jouer?
Chez moi à New-York, dans le Bowery Ballroom. C'est un peu comme la Flèche d'Or, en plus grand et c'est vraiment très beau. J'ai vu The National, quand ils ont commencé à percer là-bas, ils y ont joué cinq soirs de suite. Donc je pense que ça serait très romantique d'y jouer et fantastique de le remplir mais bon là je tourne en Europe et je joue dans pleins de villes magnifiques. J'aimerais jouer un peu plus au Nord, explorer un peu.
C'est comment la vie en tournée? Tu aimes, tu t'ennuies?
Non, j'aime bien. Je m'y habitue de plus en plus. Aux États-Unis, être en tournée c'est nul, tu es dans un van, tout est loin, tu passes ta vie en voiture, c'est super ennuyeux. Mais ici, tu prends le train, et peut-être parce que je n'ai jamais fait de tour bus pour moi c'est génial, j'ai l'occasion de me reposer dans le train pendant quelques heures, ensuite arriver dans la ville suivante, ça me convient parfaitement. C'est un des Rolling Stone qui disait "une tournée c'est 5% sur scène et 95% d'attente". C'est ce que je n'aime pas, toute cette attente. Même quand tu vas à la salle de concerts, tu fais tes réglages à 18h et tu ne joues pas avant 23h, ça te fait 5h d'attente, c'est pourquoi il y a autant d'alcooliques dans la musique!
Ton groupe s'appelle The World Without Magic et justement qu'est-ce que serait un monde sans magie pour toi?
En théorie c'est le lieu où je ne peux pas faire de musique, ni être entouré des gens que j'aime. J'ai longtemps lutté contre mon côté assez déprimé et je crois que la musique m'a permis de m'en extirper. Donc oui un monde sans musique serait plat, terne, sans caractère, même si ça sonne très niais dis comme ça.
Pour qui rêverais-tu d'ouvrir?
The National! Je les respecte beaucoup aussi bien en tant que paroliers que musiciens. Boxer est pour moi leur meilleur album, les paroles sont géniales. Ou sinon Robert Wyatt, je peux continuer comme ça longtemps... Pour David Bowie!
Ton meilleur souvenir jusqu'ici avec ton groupe?
Je pense que c'est un soir à Paris, on a réalisé qu'on était loin de chez nous et que malgré tout on se sentait acceptés, au Pop In je crois. Je me sentais apprécié, que les gens acceptaient de me donner une chance, c'est tout ce que je demande. Trouver les bonnes conditions pour que les gens aient envie d'écouter ta musique, c'est le plus dur. Il y a eu un moment comme celui-ci à Madrid également.
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